Culturel



" L'analyse d'une Oeuvre "                      

                   par François Walgenwitz        francois.walgenwitz@sfr.fr


                          

Luc Hueber 

(1888-1974)




Hiver
 
(Huile sur toile – Collections particulière)


© François Walgenwitz


    Les paysages de Luc Hueber, genre dans lequel il excelle, sont en général ouverts sur des ciels lumineux, des ciels de dimanche d’été. Ses scènes de rue sont le plus souvent traitées en plongée, en situation dominante.

    Ici, rien de tel. Nous sommes devant un tableau à la fois original et tout à fait représentatif de l’œuvre de Luc Hueber. Contrairement aux autres paysages peints pour le plaisir de l’œil, celui-ci s’adresse à l’esprit, suscite la réflexion qui aboutit au constat d’un paradoxe, d’un contraste frappant entre l’indigence du sujet et la richesse chromatique.

    Ces maisons basses, accolées, assoupies sous la neige semblent lutter désespérément contre le froid, d’autant que les cheminées qui se dressent sur les toits transis sont éteintes; elles manquent à leur devoir et accablent la misère qu’elles dominent. Luc Hueber s’est posté côté jardins, domaine intime, révélateur d’un certain désordre anecdotique, bohème, d’un certain laisser-aller populaire… Les arbres fruitiers de tous âges ont l’air d’y avoir poussé en toute liberté. La neige elle-même qui couvre le sol de façon irrégulière et tumultueuse ajoute à la confusion. Enfin, les hardes suspendues pour un hypothétique séchage, à un fil soutenu par un poteau de fortune, attestent la modestie des habitants du quartier. Par ailleurs, la contre-plongée, qui place l’artiste plus bas que le sujet, peut être ressentie comme un hommage compassionnel aux hommes, aux femmes et aux enfants qui peuplent ces masures.

    Et pourtant comme cet alignement de linge en charpie est haut en couleurs! De même, la juxtaposition des murs compose une palette riche où alternent les teintes chaudes et froides. Parmi celles-ci, notre regard est irrésistiblement attiré par les deux volets verts; un vert savamment construit, un vert gai, un symbole d’optimisme.

    Le bleu intense du ciel qui pèse sur le paysage se combine aux nombreuses touches d’une grande variété de nuances de la même couleur pour former un camaïeu significatif de froidure. Il participe à l’impression d’équilibre qui émane de cette composition; équilibre qui résulte de la répartition des horizontales et des verticales avec cependant un avantage à ces dernières qui impriment un élan vers le ciel comme une note d’espérance.

    Quand Robert Heitz dit de Luc Hueber: «Inlassablement, il s’échine à serrer de plus près la réalité des choses, à donner de leur substance un équivalent coloré….par sa recherche de profondeur et de simplicité, il est solidement ancré dans la réalité.», nous sommes bien d’accord….

 

….Et nous le sommes certainement aussi pour adresser toutes nos félicitations à l’heureuse propriétaire de ce petit chef-d’œuvre, pour la pertinence de son choix...




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